•  

    170c1.jpg 

     

    Je consacre ici un article pour résumer ce que j’ai trouvé et compris des Templiers au cours de mes recherches, plus exactement de leur système bancaire, au travers de mon mémoire. Joie non-dissimulée de pouvoir m’exprimer et poser des questions/problématiques librement, où ce n’était clairement pas le cas au sein de l’Université « bien pensante ».

    Car oui, sous la direction d’un tuteur de mémoire ou de thèse, il est difficile de soulever des problématiques allant à l’encontre du dogme universitaire. Pensée unique quand tu nous tiens…

    Pour comprendre un mal, il faut remonter à son origine. Donc pour comprendre les banques modernes, approchons ses ancêtres.

    La création de l’ordre

    Le sceau de l’ordre du Temple représentant 2 personnes partageant le même cheval. Symbole de pauvreté. (Bien que chaque templiers puisassent posséder jusqu’à 3 chevaux…) On peut y lire « Sigilum Militum Xpisti » = « Sceau militaire du Christ ». Cliquez sur l’image pour l’agrandir.

    Les Templiers, de leur titulature complète Les pauvres chevaliers du Christ de l’ordre du Temple de Salomon (rien que ça !) ont vu le jour au début du XIIème siècle, sans doute à Jérusalem, sur l’initiative d’Hugues de Payns. Bref rappel historique pour les personnes n’étant pas familiarisées avec le sujet. Il y a pour ainsi dire, trois dates importantes dans la fondation de l’ordre du Temple : la première, 1120 sur l’initiative d’Hugues de Payns à Jérusalem donc.

    La règle du nouvel établissement fut mise au point lors d’un concile tenu à Troyes le 14 janvier 1129. C’est la seconde date. Et le 23 mars 1139, la troisième date, qui est la reconnaissance canonique de l’ordre via la bulle « Omne datum optimum » du Pape Innocent II, qui officialise l’existence des Templiers et spécifie tous les avantages qui leur sont accordés, soit :

    • Seul le pape a autorité sur les Templiers. Les tribunaux laïcs et religieux ne peuvent statuer à leur sujet .
    • Dispense de payer la dîme (Impôt ecclésiastique) plus des droits des quêtes….
    • … tout en leur accordant la jouissance des dîmes qui leur auront été données en accord avec les évêques !
    • L’Église accorde aux chevaliers du Temple la possibilité de garder tout type de butin conquis en Terre-Sainte sur les sarrasins.
    • Les Templiers possèdent et nomment leur propre prêtre.

    La vocation première des Templiers est de protéger et d’accompagner les pèlerins sur les routes qui mène à la terre sainte. Officiellement car pendant plusieurs années après la création de l’ordre, les Templiers étaient au nombre de sept… « Heuuuu sept grands et beaux chevaliers élancés sur leur chevaux robustes pour protéger la veuve et l’orphelin sur toute la route Paris-Jerusalem? Ah mais oui bien sur, on y croit !!! »

    Bref, il est évident que leurs intentions étaient toutes autres…. Très tôt on remarquera des liens (parfois amicaux, parfois familiaux) entre les familles régnantes en terre sainte et les Templiers : là ou viennent se mêler intérêt personnel et politique. C’est toujours la même musique n’est-ce pas? Mais ne nous égarons pas.

    Facile dans les conditions décrites ci-dessus d’accumuler des richesses non?

    Développement économique du Temple

    D’autant plus que les Templiers profiteront justement de ces conditions favorables pour développer leur « pôle financier », et ils le firent très rapidement ! Comme l’atteste le prêt hypothécaire le plus ancien, puisqu’il date d’octobre 1136, contracté dans le Sud de l’Espagne entre un couple et les Templiers, lequel leur prêta juste de quoi financer le pèlerinage en terre sainte, en échange d’une garantie mobilière et immobilière (1). Première constatation : ce prêt date de 1135, soit trois ans avant la reconnaissance canonique de l’ordre par l’Église, quand même!!

    Deuxièmement, le premier prêt connu à ce jour a été contracté en Espagne…  Ceci démontre la rapide extension des services financiers des Templiers dans l’Europe, au-delà de l’aspect primaire militaro-religieux de l’ordre !

    Et troisièmement,  ce système représentait un très très bon moyen d’enrichissement (encore une fois).

    Contexte : Nous sommes vers 1140, je suis un grand et beau (déjà) riche Templier, tu es un pauvre petit paysan souhaitant accomplir son pèlerinage pour devenir un bon petit croyant et ainsi gagner ta place au paradis. Parce que je suis gentil et bien intentionné, je vais te prêter une petite bourse remplies de petites piécettes pour que tu puisses te rendre à Jérusalem. C’est cool hein? Et toi en échange de ce petit service de rien du tout, tu va mettre tous tes biens (ou une partie des biens) en hypothèque. Équitable non?

    Gonfanon représentant la croix pattée des Templiers.

    Redevenons sérieux trente secondes pour analyser ce cas de figure qui, bien que vulgarisé, romancé et légèrement ridiculisé, est représentatif des tenants et aboutissants des prêts bancaires :

     

     

    N’y aurait-il pas parfois conflit d’intérêt ?! Je vous pose la question ami lecteur ! On a vu que les Templiers ont été créés afin de sécuriser les routes menant à la terre sainte pour les pèlerins. Ok! On a aussi vu que les Templiers prêtaient aux pèlerins, en cas de besoin, de l’argent contre garantie et/ou hypothèque, afin de les aider à accomplir leur pèlerinage. Toujours ok? Mais qu’a-t-il pu bien se passer dans la tête d’un Templier à ce moment là, dans le cas où la somme prêtée serait inférieure à la valeur de la garantie ou de l’hypothèque. Ne serait-il pas tenté de souhaiter la malencontreuse mort dudit pèlerin ? Peut-être même par suicide assisté allez savoir !

    J’invoque une citation :

    «Mais il me paraît difficile d’admettre que des hommes aussi puissants et maniant des sommes aussi considérables, aient pu demeurer, dans l’ensemble, si intègres. Pour un scandale public et sévèrement puni, n’y en eut-il pas nombre d’autres, discrètement étouffés ? Les règles de l’Ordre étaient une barrière fragile contre la tentation, et j’ai peine à croire que les banquiers du Moyen Âge aient été sensiblement plus vertueux que ceux de nos jours. » 

    Tout est dit…

    Afficher l'image d'origine

     

    La puissance financière des Templiers

    Très rapidement les Templiers se sont enrichis, à l’image de leur bourse qui a prit de l’ampleur avec le temps. Leur notoriété prit le même chemin. Très vite ils se sont retrouvés à prêter de l’argent aux rois, et même au pape en personne ! Ajouté à cela, les biens immatériels et matériels récupérés sur les dettes non-payées sur les paysans ayant perdu la vie en pèlerinage. Plus le fait que chaque Templier souhaitant rejoindre l’ordre se devait de lui faire un don (la très grande majorité des Templiers étaient issus de la basse et de la moyenne noblesse), et vous comprenez quelle a pu être la puissance des Templiers sur son temps.

    A propos de banquiers du moyen âge, n’oublions pas que les Templiers ne furent pas les seuls dans ce domaine d’activité, puisque les banquiers florentins et vénitiens exerçaient déjà avant les Templiers, à la différence que ces derniers n’exerçaient que dans leur ville et rarement au-delà, avec une seule et unique monnaie. Les Templiers, eux, ont repris cette idée pour l’appliquer à plus grande ampleur à une grande partie de l’Europe, soit au monde méditerranéen de l’époque médiévale, en inventant au passage le fameux billet de banque ! Ce papier était remis au pèlerin, au départ de Paris (par exemple) sur lequel était indiqué que ledit pèlerin a déposé une somme X au Temple de Paris, et que par conséquent ce billet de banque autorise ce même pèlerin a récupérer la somme X une fois arrivé au Temple de Jérusalem.

    Ne serait-ce que par leur système financier, les Templiers étaient véritablement un pont entre l’orient et l’occident.

    Les Templiers importèrent d’Orient énormément de techniques aussi bien bancaires, commerciales, ou encore architecturales. Le système bancaire mis en place par les Templiers était fait pour transférer des fonds de l’Occident à l’Orient, non l’inverse. C’est probablement à cet effet qu’a servi l’importante flotte navale dont disposaient les Templiers, et non à un but militaire (3). Absurde? Alors dites-moi combien de batailles navales concernant les Chevaliers du Temple l’histoire a-t-elle retenue?

    Tout ceci explique en quoi la perte de la terre sainte, via la perte de Saint-Jean d’Acre en 1291, fut un coût terrible pour les Chevaliers de l’Ordre du Temple et l’Église.

    Pertes dont aucun des deux ne se relèvera…

    Carte de la présence templière en Europe. On y voit les principaux fiefs et commanderies.

    Début du XIVème siècle, soit en 1308 puis en 1314, c’est le moment qu’a choisit Philippe le Bel pour porter l’estocade. De la moitié du Moyen Âge jusqu’à l’époque moderne, le but des rois (pouvoir temporel) en Europe sera de se détacher de l’influence de l’Église (pouvoir spirituel), alors que celle-ci cherchera justement à préserver son emprise sur les royautés européennes. En portant un coup aux Templiers, Philippe IV dit Le Bel avait l’occasion de faire d’une pierre deux coups : d’un côté affaiblir l’Église en abattant son bras armé et ainsi se détacher de son influence, et de l’autre ne pas avoir à rembourser les prêts que les Templiers lui avaient octroyés. Le procès des Templiers était tout simplement politique et rien d’autre !

    C’est cool tout ça, mais il est où leur trésor ?!

    « Et le trésor des Templiers dans tout ça? Toi, rédacteur de cet article tu va me dire que Philippe le Bel n’en avait pas après l’or des Templiers peut-être? Bouh que tu es naïf ! »

    Patience jeune padawan, laisse-moi te répondre : probablement que le roi de France, Philippe IV dit le Bel, n’aurait pas été contre le fait de mettre la main sur le trésor. Surtout au vu des instabilités économiques et des dévaluations monétaires effectuées par le roi en vue de trouver un équilibre. Mais l’héritier des Templiers, de leur trésor, de leur infrastructures, etc était déjà tout trouvé : non pas l’Église elle-même (qu’aurait-elle fait de toutes ces armes et commanderies?), mais les Hospitaliers, ou les Chevaliers de l’ordre de Malte de Saint-Jean de Jérusalem. Après lecture de cet article, il n’est pas étonnant de constater que les Hospitaliers bénéficiaient d’une importante flotte maritime. Normal, c’est celle que les Templiers leur ont cédé involontairement, s’ils n’avaient pas commis l’erreur politique majeure de mourir… idem pour une partie des possessions matériels et immatériels !

    Alors pourquoi cela ne serait-il pas également le cas pour le fameux trésor ?

    Comment distinguer les 5 ordres militaires? Cliquez pour agrandir.

    Quoi qu’il en soit, d’une manière ou d’une autre, il est évident que l’héritage des Templiers a perduré dans le futur. Et qui sait, peut-être que les banquiers du Moyen Age sont les ancêtres de ceux d’aujourd’hui ?

    Lisandro Dias

    Edito : Evidemment la question de l’usure mérite un article à lui tout seul, non seulement pour ce qui est de la période médiévale ou des Templiers, mais pour toutes les périodes de l’histoire. J’ai lu dans plusieurs de vos commentaires (sur Facebook et Twitter par exemple) que vous soulignez le fait que les Templiers n’étaient pas les premiers banquiers de l’histoire. Vous avez en partie raison. Les Templiers furent les premiers véritables banquiers (au sens contemporain du terme) dans la mesure où, leurs activités économiques traversaient les frontières et prirent une ampleur jamais égalée auparavant : on parle bien d’une influence sur plusieurs continents et plus précisément sur l’ensemble du monde méditerranéen, voir même sur l’Asie !

    Pour revenir à la question de l’usure, je tâcherai d’être concis : Bien que fermement condamnée par l’église, l’usure était tolérée par cette dernière. Le terme exacte serait « camouflée » comme le rapporte une des archives que j’ai pu consulter par la suite :

    «  Nous avons ici un prêt hypothécaire camouflé en deux dons réciproques, faits par charité pour éviter la condamnation de l’usure si souvent formulée par l’Église. L’usufruit de la propriété pendant l’absence des emprunteurs représente l’intérêt sur le capital » (4).

    Je pense que cette courte citation suffit amplement à comprendre le stratagème qu’utilisaient les Templiers pour pouvoir prêter de l’argent avec des intérêts, très certainement en accord avec l’Église. Pourquoi l’Église aurait-elle élevé la voix contre son bras armé, alors qu’elle lui a justement accordé autant d’avantages par le passé? (Voir la première partie de l’article « La création de l’ordre« ) N’aurait-ce pas été se tirer une balle dans le pied?

    Les taux d’intérêts des prêts étaient assez variés en fonction de la somme demandée, de la zone géographique dans laquelle était contractée le prêt, ou encore de l’usage que le client souhaitait faire de cet argent par exemple. Bien que les taux d’intérêts pouvaient atteindre jusqu’à 25%, l’impact sur le remboursement n’était pas du tout le même que de nos jours, si l’on veut faire la comparaison, pour des questions d’ordre économique assez complexes et pour des raisons de sécurité. (Les chances de se faire rembourser étaient quand même plus faibles qu’à notre époque. C’est peut-être le calcul qu’on fait les Templiers…)

    Mais ce n’est pas certain que ces prêts aux taux parfois exorbitants furent la première source d’enrichissement des Templiers. N’oublions pas qu’à l’époque médiévale les économies tournaient plus autour du foncier que de la monnaie, qui prendra, à partir du XIème siècle environ, avec le début de l’essor des villes, petit à petit la place que nous lui connaissons aujourd’hui.

     

     

    sources :

     

     

     

     


    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique